Matériaux en contact avec les aliments : un nouveau cadre réglementaire s’impose
Générations Futures a participé à la consultation publique de la Commission européenne visant à réviser la législation européenne qui encadre les matériaux en contact avec les aliments (Food contact materials – FCM). La feuille de route présentée par la Commission offre une occasion d’appeler à une révision complète de la législation actuelle.
De nombreuses substances chimiques nocives se trouvent dans les emballages alimentaires ou les les ustensiles de cuisines et ne sont toujours pas réglementés.
Le nouveau rapport de l’Endocrine Society et de l’IPEN intitulé « Plastiques, Perturbateurs endocriniens et Santé », met évidence la menace que représente les additifs chimiques du plastique sur notre santé et l’environnement. L’exposition à ces produits chimiques, dont plusieurs sont reconnus PE, peut se produire pendant toute la durée de vie du produit, du processus de fabrication au contact avec le consommateur, en passant par le recyclage, la gestion et l’élimination des déchets. Les plastiques biodégradables qui sont présentés come plus écologiques et généralement utilisés dans des applications à coure durée de vie tels que les emballages alimentaires, contiennent aussi des additifs chimiques similaires. Cette étude nous apprend que l’on retrouve principalement 7 familles de produits chimiques dangereux pour la santé, utilisés comme additifs ou matières premières pour la fabrication de plastique : les bisphénols ; les composés perfluorés (PFAS) (qui rassemblent une famille de 4.700 molécules distinctes, pourtant seule une poignée est régulée – PFOA, PFOS – au niveau mondial) ; les phtalates, les alkylphénols, les retardateurs de flamme bromés et les dioxines (produites lors du processus de recyclage des plastiques).
Afin d‘atteindre les objectifs fixés dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe, de la Stratégie de la ferme à la fourchette et de la nouvelle Stratégie durable sur les produits chimiques, l’UE doit sans plus attendre interdire les produits chimiques dangereux dans l’ensemble des FCM. Les lacunes de la législation actuelle sur les FCM, telle que la non-prise en compte des substances extrêmement préoccupantes, des perturbateurs endocriniens (PE) ou encore des substances non ajoutées intentionnellement (NIAS) ne sont plus acceptables. De plus, les conditions d’exposition réelles aux produits chimiques contenus dans les FCM, ainsi que les effets synergiques des additifs avec ces substances sont négligés dans le processus actuel d’évaluation des risques. Enfin, les matériaux recyclés ne sont pas évalués en fonction de leurs effets néfastes sur la santé.
Plus précisément, nous demandons que l’interdiction des substances chimiques dans les FCM porte en priorité sur :
- Les substances classées cancérogènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction, de catégorie 1A/1B ou 2 ;
- Les PE avérés, présumés et suspectés ;
- Les substances persistantes, mobiles et toxiques (PMT) et très persistantes et très mobiles (vPvM).
Dans l’attente de l’interdiction de ces substances dans les FCM, nous demandons à la Commission de prendre des mesures pour informer les consommateurs sur la présence de ces produits dangereux par la mise en place d’un étiquetage. Nous regrettons que la feuille de route fasse l’impasse sur cette question. De plus, nous nous inquiétons de lire que l’une des approches énoncée par la Commission suggère une participation de l’industrie dans le processus d’évaluation des risques. Ce point doit être clarifié et ce travail essentiel d’évaluation des risques doit être conduit de manière totalement impartiale et transparente par des autorités indépendantes. Enfin, la feuille de route ne précise pas de mesures concrètes pour combler les lacunes méthodologiques en matière d’évaluation des risques (prise en compte des PE, des faibles doses, de la relation dose-réponse non monotone, des effets neurotoxiques, ou encore des effets cocktails).
Nous soutenons par ailleurs la volonté affichée d’appliquer le principe de précaution, de prendre en compte l’effet cocktail et de protéger en priorité les populations vulnérables, à savoir les femmes enceintes et les enfants.
La révision de la législation actuelle s’impose pour permettre la mise sur le marché d’emballages alimentaires sûrs et durables, intégrés dans une économie circulaire exempte de produits chimiques toxiques pour la santé et l’environnement. Nous attendons de la Commission qu’elle une réforme en profondeur afin de respecter ses engagements et d’atteindre l’objectif « zéro pollution » à l’horizon 2030.