La publication du 4e plan national santé environnement, longtemps attendue et reportée, en partie en raison de la crise sanitaire de la Covid-19, n’est absolument pas à la hauteur des enjeux de santé publique. Copiloté par les ministères de la Transition écologique et de la Santé, ce plan annonce pour les quatre années à venir (de 2020 à 2024) un ensemble de mesures à prendre pour réduire les risques sanitaires liés à la pollution généralisée de notre environnement.
Au-delà du constat alarmant rappelé en début du plan : la pollution de l’air extérieur – considéré comme la première source de mortalité environnementale – serait responsable de 48.000 à 67.000 décès prématurés annuels en France, la crise de la Covid-19 nous pousse à repenser nos modes de vie, ainsi que notre rapport à notre environnement. Nous savons ainsi maintenant que la pollution de notre environnement peut avoir un rôle essentiel dans l’impact de ce virus. Même si les formes graves de la Covid-19 touchent majoritairement les personnes âgées, elles touchent aussi des personnes jeunes et celles souffrant de maladies chroniques (maladies respiratoires, maladies cardiovasculaires, diabète). L’explosion de ces maladies chroniques est en grande partie liée à la détérioration de notre environnement et par notre exposition quotidienne à de multiples polluants chimiques, tels que les perturbateurs endocriniens.
Cette épidémie met donc en lumière un grand nombre de dysfonctionnements et interroge sur les choix faits en matière de santé publique. C’est pourquoi nous attendions que les ambitions de ce plan évoluent radicalement et que soient affichées des mesures beaucoup plus fortes. Or, ce plan ne fixe aucun objectif tangible et ne contient aucune mesure coercitive pour réduire notre exposition aux polluants environnementaux. Ce quatrième volet reste ancré dans une vision passée de la santé environnementale et peine à proposer des mesures réellement innovantes.
Le titre même du plan « Mon environnement, ma santé », pose problème et annonce la tendance dominante : chacun doit être acteur de son environnement et de sa santé. Ce transfert de responsabilité n’est pas acceptable, les individus ne pouvant être tenus pour seuls responsables des expositions multiples qu’ils subissent. Ce sont les industriels et les autorités qui portent cette responsabilité principale et doivent par conséquent être les premiers garants d’un environnement sain.
Il est par exemple préconisé dans le plan de créer des outils numériques pour « faciliter l’accès aux données environnementales du quotidien et à des conseils de prévention associés ». Or, la France ne dispose pas de base de données fine et complète sur l’exposition des populations aux polluants environnementaux. Une autre action au titre ambitieux : « identifier les substances dangereuses dans les objets du quotidien » repose sur la bonne volonté des industriels à signaler la présence de substances extrêmement préoccupantes dans les biens de consommation. De même, afin d’informer les consommateurs et de les protéger, il est regrettable qu’il soit seulement question d’étudier « les modalités de mise en place d’un étiquetage volontaire », et ce uniquement pour les produits ménagers.
« Même si ce plan comporte quelques avancées telles que des actions ciblées pendant et après la grossesse, une meilleure formation des personnels de santé, des actions de sensibilisation des jeunes de 16 ans à l’occasion de leur service national universel, ou encore la prise en compte de thématiques orphelines qui ne sont traitées dans aucun plan (réduire l’exposition aux ondes électromagnétiques, à la lumière bleue, au bruit, mieux gérer les risques associés aux nanomatériaux), Générations Futures déplore le manque de hauteur de vue de cette stratégie. De plus, il n’est prévu aucune mesure coercitive à l’encontre des industriels qui commercialisent des produits contenant des substances connues ou suspectées d’être dangereuses pour la santé et l’environnement et qui ne développent pas de mesure de substitution. Rien n’est annoncé non plus en faveur d’une application plus stricte du principe de précaution. En l’état, ce plan n’offre pas le cadre qui permettrait de changer de paradigme pour faire de la santé environnementale un sujet à part entière en termes de santé et de recherche. Il importe à présent de participer à la consultation publique qui se déroulera jusqu’au 9 décembre, pour exiger que la France se dote enfin d’une vraie politique de santé environnementale », déclare François Veillerette, directeur de Générations Futures.