Révision de la définition des nanomatériaux : un processus lent et fastidieux

En octobre 2011, la Commission européenne a publié une définition des nanomatériaux sous la forme d’une recommandation : « On entend par « nanomatériau » un matériau naturel, formé accidentellement ou manufacturé contenant des particules lires, sous forme d’agrégat ou sous forme d’agglomérat, dont au moins 50% des particules (ce seuil peut être abaissé à 1% dans des cas spécifiques), dans la répartition numérique par taille, présentent une ou plusieurs dimensions externes se situant entre 1 nm et 100 nm ».

Cette définition a été fortement critiquée. Jugée trop large par les industriels et trop restrictives par les ONG qui considèrent qu’elle ne vise pas de nombreux matériaux nanométriques. Le texte de la Commission prévoyait que cette définition soit révisée d’ici à décembre 2014, or la procédure est toujours en cours. La consultation publique sur la révision de la définition d’un nanomatériau qui devait être lancée en 2014 a finalement, après de multiples reports, été lancée… en mai 2021 ! Cette dernière portait sur l’intérêt de réviser les termes de la définition existante et d’envisager des déclinaisons ou une harmonisation dans les multiples secteurs d’activité.

Rappel : plus de 400.000 tonnes de nanomatériaux sont produites ou importées en France chaque année.

Du fait de leurs propriétés particulières et leurs multiples applications, les nanomatériaux sont incorporés dans une large gamme de produits de consommation courante. On les retrouve dans l’alimentation, les cosmétiques, les produits d’hygiène, les textiles, les emballages alimentaires, les peintures, etc. Or, la dissémination massive de ces nanomatériaux soulève des interrogations vis-à-vis des de leurs effets sur la santé et l’environnement, notamment du fait de leur capacité à passer les barrières physiologiques, leur taille facilitant leur pénétration dans l’organisme.

 

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), dans sa réponse à la consultation estime que les modifications de la définition suggérées par la Commission « tendent à restreindre le nombre et la nature des objets qui seront considérés in fine comme nanomatériaux ». Les nanoparticules de plastique, certaines émulsions et certains lipides d’échelle nanométrique, pourtant de plus en plus utilisés dans l’industrie, pourraient ne pas relever de cette nouvelle définition.

L’Agence rappelle que les seuils de tailles (1-100 nm) utilisés dans la définition actuelle ne reposent sur aucun fondement scientifique et regrette que ces seuils ne soient pas débattus dans la cadre de cette première consultation. Selon l’Agence, « la définition doit être la plus englobante possible ». Pour l’Anses, les nanomatériaux doivent être définit de manière unique, sur la base des critères physico-chimiques.

Actuellement, au sein de l’Union européenne, la définition des nanomatériaux est différente selon les secteurs d’activité. Comme le rappelle l’association AVICENN, l’harmonisation de la terminologie a été demandé par toutes les parties prenantes (industriels, autorités publiques, associations) pour mettre un terme aux difficultés rencontrées en raison de définitions hétérogènes. La Commission avait signalé que la recommandation révisée de sa définition soit juridiquement contraignante. Elle devrait donc d’appliquer pour l’enregistrement des nanos dans le cadre de la réglementation REACH et dans les autres réglementations de l’Union concernant les cosmétiques, l’alimentation, les biocides et les dispositifs médicaux.

Comme le demande l’Anses, Générations Futures attend de cette nouvelle définition qu’elle soit la plus large possible afin de viser le plus grands nombres de nanomatériaux mis sur le marché. Nous attendons aussi de la Commission qu’elle tienne ses engagements. Point positif après tant d’année d’inertie: la volonté de réviser la définition des nanomatériaux figure dans la Stratégie durable sur les produits chimiques, ainsi que la volonté d’une « application cohérente dans l’ensemble de la législation en utilisant des mécanismes juridiquement contraignants« . La Commission a fixée la l’échéance de 2021 pour mener ces travaux.