Stratégie durable sur les produits chimiques de l’UE : les points forts de la stratégie à suivre avec attention

Le 14 octobre dernier, la Commission européenne publiait sa stratégie durable sur les produits chimiques. La Commission a envoyé un message fort en publiant une stratégie au contenu ambitieux, davantage centré sur la prévention, malgré la pression des géants de la chimie et celle des directions générales chargées de l’industrie et de la santé au sein de la Commission européenne. De nombreuses ONG, en particulier celles membres du réseau européen HEAL (l’Alliance pour la santé et l’environnement – Health and Environment Alliance), dont Générations Futures fait partie, se sont mobilisées tout au long du processus d’élaboration de la stratégie pour formuler des demandes et alerter les députés européens sur les dangers sanitaires et environnementaux des produits chimiques.

Les mesures fortes de la stratégie

Cette stratégie met l’accent sur la prévention et annonce des mesures fortes sur les perturbateurs endocriniens (PE), sur la réduction de l’utilisation des composés perfluorés (PFAS), sur les mélanges, ou encore sur la révision de la législation européenne Reach.

Plus précisément, figurent dans la nouvelle stratégie :

Un engagement pour la production et l’utilisation de produits chimiques sûrs

  • Développer le concept de « hiérarchie sans toxique » (2021) : dans cette optique, les produits chimiques sont produits et utilisés en vue de maximiser leurs avantages pour la société tout en évitant les dommages causés à la planète et aux personnes. Selon cette logique, la production et l’utilisation de produits chimiques sûrs et durables deviennent alors la norme du marché de l’Union et une norme mondiale.

D’importants gains pour la santé et la protection des consommateurs

  • Etendre l’approche applicable aux substances classées comme cancérogène, mutagène, reprotoxique (CMR) à d’autres substances dangereuses : notamment aux PE, aux substances persistantes, mobiles et toxiques (PMT) et très persistantes et très mobiles (vPvM), pour 2022 ;
  • Limiter la présence de substances dangereuses dans l’ensemble des produits de consommation : par l’interdiction des PE dans les produits de consommation, et par l’adoption de recommandations et de restrictions pour les produits de puériculture en 2021 ;
  • Refondre le cadre de l’Union sur les PE (2021 – 2022) : avec la mise en place une identification des PE juridiquement contraignante, basée sur la définition de l’OMS, en s’appuyant sur les critères déjà élaborés pour les pesticides et les biocides et étendre son application dans toutes réglementations. Il est aussi annoncé la volonté d’introduire les PE comme catégorie de substances extrêmement préoccupante dans REACH ;
  • Agir sur les PFAS (2020 – 2024) : en interdisant tous les PFAS dans les mousses traitées pour lutter contre les incendies et les autres utilisations qui ne seront pas jugées comme étant essentielles ; en adoptant une approche commune sur les PFAS pour toutes les législations et par l’introduction de limites réglementaires dans la législation sur les contaminants alimentaires ; enfin, en soutenant financièrement la recherche pour développer des techniques d’assainissement et de décontamination.

Une amélioration du cadre législatif

  • Améliorer le règlement Reach (2021 – 2022) : avec l’application du principe « Zero tolerance for non-compliance » ; l’élaboration d’une feuille de route pour prioriser des groupes de restriction visant les CMR, les PE, les substances PMT et vPvM ; la création de nouvelles catégories dans Reach pour les substances PMT et VPvM ; la réviser les exigences en matière d’enregistrements de certains polymères, de groupes de substances et l’obligation de fournir plus de propriétés sur les dangers des substances enregistrées; ainsi que la révision des processus d’autorisation et de restriction ;
  • Mieux prendre en compte l’effet cocktail (2022) : avec l’ouverture d’une discussion sur les facteurs d’évaluation des mélanges dans le cadre de Reach et sur les dispositions relatives à considérer ces effets dans les autres législations (ce qui constitue un point très positif) ;
  • Arrêter l’exportation de substances dangereuses interdites dans l’UE (2023)

Voici les point forts figurant dans la stratégie que nous suivrons avec la plus grande attention. Nous resterons extrêmement vigilants car, rappelons-le, la stratégie ne contient que des orientations et toutes ces annonces devront se traduire en actes législatifs pour être mises en œuvre.

De plus, le concept d’innovation prime tout au long de la stratégie sur celui de « protection », aucune mesure contraignante n’est annoncée, ni d’actions concrètes pour mettre en application le principe de pollueur/payeur. Le vocabulaire employé dans la stratégie laisse toujours une marge d’interprétation (notion « d’usage essentiel pour la société » ou encore de « conception sûre et durable »). Ainsi, l’interdiction des PE dans les produits de consommation s’appliquera dès qu’ils seront identifiés comme tel et sous réserve que leur utilisation ne s’avère pas essentielle pour la société.